Les résultats de cette semaine en dents de scie des banques ont démontré que le secteur des prêts ralentissait. L’immobilier est à un sommet au Canada et le taux d’endettement de ses habitants est à un niveau record, c’est-à-dire 165% des revenus disponibles. À mon avis, il faut s’attendre à ce que le ralentissement s’amplifie encore avec le temps. Les banques ont été avantagées au cours des deux dernières décennies par la baisse continue des taux d’intérêts. La mécanique était simple : elle octroyait des prêts à long terme puis elle empruntait à court terme. La courbe des taux d’intérêt à joué en leur faveur pendant cette longue période de temps. Il est évident qu’au taux actuel, il n’y a plus beaucoup d’espace afin de continuer à capitaliser sur la chute des taux. Selon moi, l’environnement actuel au niveau du pourcentage d’intérêt mettra beaucoup de pression sur les marges bénéficiaires des banques canadiennes. À mesure que les consommateurs vont rembourser leurs lourdes dettes, cela fera baisser la demande de prêts, ce qui amènera les banques à vouloir s’arracher les clients. Elles se feront plus attrayantes pour les garder, ce qui aura inévitablement un impact sur leur rentabilité.
Ce qui me surprend le plus actuellement, c’est l’enthousiasme des analystes pour les banques canadiennes. Ils les recommandent davantage aujourd’hui qu’au creux de leur valeur en 2009, alors qu’elles se transigeaient à la moitié de leur valeur actuelle. Les banques canadiennes sont sorties de la dernière crise avec l’aura des banques les plus solides au monde, ce qui leur a permis de prendre de l’expansion alors que les autres banques étaient obligées de contracter la taille de leur entreprise, ce qui fait qu’aujourd’hui lorsque l’on regarde la structure du capital des banques canadiennes à comparer à celles des grandes banques américaines, nous avons des ratios d’équité vraiment différents. Par exemple, lorsque l’on soustrait la partie des actions privilégiées de l’équité de la Banque Royale, elle se retrouve avec seulement 4,78% en équité au bilan alors que la grande banque américaine Wells Fargo est à 9,80%. Comme je l’ai mentionné dans un texte de l’année dernière au sujet des nouvelles normes bancaires (Basel 3), il faut, selon cette nouvelle entente, que la base d’équité soit au minimum de 10% de la taille de l’entreprise. Bien que pour l’instant, on en parle peu, je me doute qu’un jour, les firmes de cotation américaines feront leur chou gras de cette lacune du bilan des banques canadiennes.
On a l’impression de se retrouver dans la fable de La cigale et la fourmi. Pendant qu’on chante les mérites de nos banques canadiennes, les banques américaines travaillent à épurer leur bilan financier, ce qui a pour résultat qu’aujourd’hui, elles ont plus d’espace financier pour prendre de l’expansion que nos banques canadiennes. Bien sûr, les dividendes des banques canadiennes sont alléchants, mais est-ce que cela en fait pour autant un investissement vigilant et prudent pour le futur? En ce qui me concerne, je vois des opportunités plus intéressantes ailleurs pour le moment.