Pascal Charpentier

Une statistique publiée par Boomberg la semaine dernière au sujet des ventes à découvert a retenu mon attention par son ampleur et les impacts que ce phénomène a sur les marchés financiers. À l’heure actuelle, sur les marchés américains, le total des ventes à découvert a dépassé le trillion de dollars US en actions, ce qui est plus que le précédent record atteint au pire de la dernière crise en mars 2009 ! Pour bien comprendre, ces ventes à découvert sont en réalité des positions artificielles, car en fait, il s’agit d’investisseurs qui vendent des actions  qu’ils ne détiennent pas, et qu’ils espèrent racheter plus tard à rabais. Cette mécanique qui est permise par les bourses pour soit disant empêcher les bulles et régulariser l’efficacité des marchés, dénature artificiellement l’équilibre entre les vendeurs et les acheteurs, avec pour résultat que les ventes à découvert actuelles créent beaucoup de volatilité sur le marché et amènent des compagnies à des prix qui n’ont aucun lien avec la réalité de leurs fondements. Plusieurs compagnies ont actuellement un pourcentage dangereux de ventes à découvert. Il est important de spécifier le mot “danger ” car à la différence de l’achat d’actions, la perte potentielle sur une vente à découvert est illimitée, car il n’y a aucune limite au prix auquel une action peut monter, alors qu’une action ne peut pas descendre plus bas que 0.

De l’autre côté de la tranchée

Les vendeurs à découvert semblent actuellement sous-estimer le danger qui les guettent car de l’autre côté de leurs ventes se trouvent des compagnies qui ont développé une redoutable habitude de racheter massivement leurs actions en bourse, et cela, comme jamais auparavant.  Pour plusieurs compagnies, on assiste une véritable guerre de tranchée :  Hedge Fund d’un côté, vendeur à découvert, contre des entrepreneurs avisés de l’autre côté qui rachètent leurs titres sur-déprimés en bourse. D’un bord, vous avez un groupe qui joue à court terme sur la baisse, et de l’autre, une armée de capitaux qui se positionnent à long terme, en éliminant le plus de millions d’actions possible. Cette guerre d’usure jouera inévitablement en faveur des entrepreneurs patients qui réduisent le nombre de soldats sur le terrain adverse.

Il se prépare un spectacle explosif où plusieurs Hedge Fund manqueront sûrement d’argent pour couvrir leurs pertes sur leurs ventes à découvert s’il leur arrivait un “short squeeze” comme celui qui s’est produit sur Volkswagen en 2008 (vous pouvez retrouver sur ma page web mon texte du mois de septembre 2015 à ce sujet). Ces resserrements sur vente à découvert peuvent produire des phénomènes vraiment spectaculaires lorsque tout à coup, les nouvelles sur la compagnie sont meilleures que prévues et qu’il n’y a plus assez de titres qui se négocient en bourse pour que les millions de vendeurs à découvert puissent racheter leurs titres en bourse. Les titres peuvent alors soudainement exploser en quelques séances. Lorsque vous êtes investis dans ce genre de titre à long terme, une telle perspective est très excitante car le nombre élevé de vendeurs à découvert dans les derniers mois a créé des situations de prix anormalement bas. Quelle opportunité !

Voyons en chiffres plus détaillés trois exemples de compagnies dans le secteur de la vente au détail qui ont d’importantes ventes à découvert sur le titre :

  1. La compagnie Bed Bath and Beyond, qui se transige à 9 fois les bénéfices.
    • Elle avait, en date du 27 février 2016, 157 millions d’actions en circulation.
    • Au cours des 3 derniers mois avant cette date, elle a éliminé 7 millions d’actions.
    • À ce rythme endiablé, la compagnie éliminerait toutes les actions en circulation en 5 ans et demi!
    • Le 2/3 des actionnaires de cette compagnie sont des gestions valeurs ou indicielles qui n’ont pas l’intention de se départir de leurs positions à court terme.
    • Il y a près de 15 millions de d’actions vendues à découvert sur ce titre.
    • À la vitesse où la compagnie se rachète et si le total de ventes à découvert reste le même, il y aura éventuellement un ajustement.

Voici deux autres exemples encore plus spectaculaires :

  1. Le magasin de jeux et d’appareils électroniques Gamestop, qui se transige actuellement à seulement 7.4 fois ses bénéfices, alors que ces derniers montent à chaque année depuis une décennie.
    • Elle a 103 millions d’actions en circulation.
    • 65 millions d’actions sont détenues par des firmes d’investissement indiciel ou valeur.
    • 34,5 millions sont vendus à découvert actuellement.
    • La compagnie a racheté 6 millions d’actions au cours de la dernière année.
    • À la vitesse à laquelle elle rachète et avec le nombre total de vendeurs à découvert en circulation, ce titre détient des atouts.
  1. Hibbett Sports, qui se transige à 8 fois ses bénéfices.
    • Elle a 22,5 millions d’actions en circulation.
    • 5 millions d’actions sont vendues à découvert.
    • La compagnie a racheté pour 1,5 millions d’actions au cours du dernier trimestre.
    • À ce rythme de croisière, il va se passer  quelque chose sur ce titre.

Dans cette guerre de tranchées entre les vendeurs à découvert et les entrepreneurs qui rachètent leurs actions, l’équilibre est maintenu tant que vous avez d’un côté quelqu’un qui veut vendre les actions et de l’autre, quelqu’un qui veut les acheter. Mais le jour où tous ces vendeurs à découvert vont vouloir racheter ces actions pour fermer leurs positions et jouer sur le même terrain que leurs rivaux, on risque d’assister à un autre genre de partie.

N’hésitez pas à communiquer avec nous pour découvrir notre offre en placement. Il nous fera plaisir de vous aider à saisir des opportunités sur les marchés financiers.

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Cette information a été préparée par Pascal Charpentier qui est un conseiller en placements et gestionnaire de portefeuille pour l’Industrielle Alliance Valeurs mobilières inc. Les opinions exprimées dans le présent article sont celles du gestionnaire de portefeuille uniquement et ne reflètent pas nécessairement celles de l’Industrielle Alliance Valeurs mobilières inc. Industrielle Alliance Valeurs mobilières inc. est membre du Fonds canadien de protection des épargnants et de l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières.

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