Pascal Charpentier

Plusieurs investisseurs ont une fixation démesurée sur le taux de dividendes que les compagnies peuvent octroyer, ce qui peut souvent les induire en erreur. Recevoir un gros chèque à tous les trois mois peut être attirant mais cela peut aussi amener son lot de problèmes. À mon avis, plusieurs compagnies paient des dividendes qu’elles ne peuvent soutenir à long terme car elles en paient davantage que les profits qu’elles font. Vous conviendrez avec moi qu’une telle situation est impossible à soutenir à long terme à moins que l’objectif de la compagnie soit de rembourser le capital à leurs actionnaires! Sinon, cela revient à dépecer trimestre après trimestre les fondements de la compagnie.

Prenons l’exemple récent de la compagnie Genivar, qui va verser 0,375 $ par action alors qu’elle n’a généré que 0,26 $ de profit au cours du dernier trimestre. La compagnie versera donc 144% des profits enregistrés. C’est tout de même drôle pour une compagnie qui a eu recours à l’émission d’une quantité astronomique d’actions en 2012 afin de faire une acquisition importante en Europe. D’une part, elle demande aux investisseurs d’injecter des capitaux massifs dans l’entreprise, et de l’autre elle rembourse du capital aux actionnaires. Le haut dividende actuel ajouté à l’émission d’actions massives en 2012 et la baisse de la rentabilité de la société ne font pas bon ménage pour sécuriser le dividende à long terme. Les dirigeants de l’entreprise sont certainement au courant de la situation mais ils savent aussi que couper le dividende ne sera pas très bien reçu sur les marchés.

Dans son article du Report on Business du 22 août 2012, le gestionnaire Michael Mccloskey souligne qu’il est souvent mieux d’investir dans des compagnies qui ont un très bon retour sur équité et qui savent faire travailler leurs capitaux propres de manière intelligente. Selon lui, si les gestionnaires sont capables de réinvestir leur argent dans leur entreprise avec un bon rendement, il est préférable qu’ils ne versent aucun dividende. Il prend en exemple Warren Buffet dans Berkshire Hathaway qui ne verse aucun dividende et pourtant, cela n’a pas empêché la compagnie de créer de la valeur pour ses actionnaires au cours des dernières décennies. Comme le mentionne encore Mccloskey, « lorsque j’investis dans une compagnie qui a un rendement sur ses capitaux propres de 20%, j’ai tout avantage à ce que la compagnie continue de maximiser mon investissement à l’intérieur de la compagnie. J’évite ainsi de payer de l’impôt sur le dividende et mon argent est mieux placé dans la compagnie que dans mon compte de banque! »

 

Néanmoins, lorsqu’une compagnie à maturité n’est plus capable de réinvestir de manière efficace, il peut alors être avantageux de redistribuer une bonne partie de ses profits sous forme de dividendes au lieu de les dilapider en faisant des acquisitions inadéquates et non rentables. De là l’importance de choisir des gestionnaires d’entreprise qui ont à cœur l’intérêt de leurs actionnaires avant tout, en prenant des décisions mesurées qui permettront d’enrichir à long terme les investisseurs. Il n’y a donc aucun mal à choisir des compagnies qui paient de bons dividendes; il faut juste s’assurer qu’elles aient les moyens de les verser à long terme.

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