Atnaé Lussier
Charles Gave

Voici un court extrait de la longue entrevue que Charles Gave a accordée à Stéphan Bureau le 26 décembre dernier dans son émission Contact. Je ne partage pas tous les points de vue de Monsieur Gave sur l’ensemble des sujets abordés dans cette entrevue. Toutefois, ses propos de la minute 12 à la minute 17 sont si clairs et percutants que je me suis permis de vous les retranscrire mot pour mot. Pour les plus curieux, voici le lien de l’entrevue : https://www.youtube.com/watch?v=Aob20q24MpU

S.B. : La dernière fois que vous êtes venus à ce microphone, il y a un an, on parlait de l’année qui s’annonçait, 2024, et la plupart des prévisionnistes étaient assez sombres, particulièrement pour ceux qui ont de l’épargne et qui veulent la faire fructifier. Or à ce jour, pour les placements américains, ou les placements technologiques, ce fut une année faste : 33% de hausse! J’aurais bien voulu suivre le marché, ce que je n’ai pas fait, en pensant être plus futé… Mais qu’est-ce qu’on a loupé, puisque tout le monde semblait s’entendre, et vous aussi, en disant que cela allait être une année très mouvementée, très volatile?

C.G. : Je vais essayer de vous expliquer. Il faut passer un peu sur ce qu’est la monnaie pour comprendre. La monnaie doit être une réserve de valeur, un outil d’échange et un standard de valeur. Ce sont les trois fonctions de la monnaie. Or, depuis 10-12 ans, les grandes démocraties sont en train d’essayer de détruire leur monnaie.

S.B. : Sciemment?

C.G. : Oui, parce qu’elles ne peuvent pas rembourser leurs dettes! Donc, quand vous ne pouvez pas rembourser la dette, il y a deux seules choses que vous pouvez faire: vous faites défaut sur votre dette, ou alors la valeur faciale de la dette tombe, avec l’inflation et tout ça. Vous me dites : « la bourse est montée de 33% dans les actions ». C’est très bien, mais c’est ce que j’appelle une hausse à la turque. Quand Erdogan, le président turc, a détruit sa monnaie il y a 7-8 ans, parce qu’il voulait être réélu, les obligations ont baissé de 90%. C’est beaucoup! La seule chose que vous pouviez acheter pour vous en sortir, c’était d’acheter de l’or ou des actions. Ceux qui en ont acheté ont eu, eux, en termes réels, 50% de rendement.

Donc, ce que vous avez eu depuis un an sur beaucoup des marchés des actions, c’est ce qu’on appelle une hausse de misère. Le marché monte parce que la monnaie est en train de se péter la gueule. Si vous mesurez le marché de New York non pas en monnaie, mais en or, vous n’avez pas gagné d’argent. L’or a monté autant que le marché. On est en train de commencer à assister à un système de fuite devant les monnaies.

S.B. : Donc, il faut investir dans tout ce qui est tangible?

C.G. : Dans les marchés, vous ne pouvez acheter que deux choses: vous pouvez acheter des contrats avec l’État français, c’est-à-dire une obligation française, ou vous pouvez acheter des parts de propriété (des actions). Normalement, dans les portefeuilles, vous avez les deux types, et ils ne sont pas corrélés.

S.B. : Quand vous dites « contrat », on peut aussi appeler ça une obligation ou loyer…

C.G. : À partir du moment où on commence à détruire la monnaie, le nombre de choses dans lesquelles vous pouvez investir baisse de moitié. Vu qu’il n’y a plus les contrats, vous êtes obligés d’aller vers l’or et les actions.

S.B. : Donc, c’est ce qui explique, selon vous, ce qui se passe et ce ne serait pas les bons rendements des entreprises qui seraient à l’origine de cette hausse…

C.G. : Non! Encore une fois, si vous divisez le cours du S&P 500 par l’or, on n’a rien fait depuis 2 ans. C’est ce que j’appelle une illusion monétaire. Les gens ont l’impression qu’ils ont gagné de l’argent. Mais en fait, s’ils avaient mis leur argent en or, ils auraient fait autant avec moins de risque.

S.B. : Qu’est-ce qui fait qu’on met un terme à l’illusion? Quel est l’événement?

C.G. : En général, ça se terminera assez mal.

S.B. : Vous demeurez donc, à moyen terme, pessimiste.

C.G. : Je ne suis ni pessimiste, ni optimiste, j’essaie d’être réaliste. Moi, ce que je dis aux gens depuis un certain temps, c’est qu’il faut avoir des parts de propriétés (des actions) ou de l’or. Soyez actionnaire de quelque chose de tangible, qui a une vraie valeur, pas d’une entreprise qui vend uniquement à l’État. Comme l’État va faire faillite, l’entreprise qui vend à l’État va faire elle-même faillite. Mais si vous achetez des entreprises qui vendent partout dans le monde des produits dont tout le monde a besoin, vous allez continuer de gagner plein d’argent. Si la zone de l’océan Indien se développe comme une fusée, Air Liquide et Schneider vont gagner plein d’argent là-bas. Mais je n’achète pas de pharmaceutiques car ce sont les programmes gouvernementaux qui les subventionnent.

S.B. : On pourrait faire l’exercice aux États-Unis. C’est encore plus pressant car ils sont à 36 000 milliards de dettes!

C.G. : C’est pour ça qu’il ne faut pas avoir d’obligations américaines…


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