Au fur et à mesure que les faillites bancaires se poursuivent au États-Unis, la population fait de moins en moins confiance au système bancaire. Voici quelques pistes de compréhension des causes de cette crise qui ne fait que débuter.
D’emblée, ce que l’on doit retenir, c’est qu’une banque est une institution qui prête à long terme et qui emprunte à court terme. Depuis 2008, ce mécanisme était on ne peut plus efficace : les banques pouvaient emprunter à la banque centrale à 0 % et faire de l’argent sur des prêts à 2 % tout en se servant de la valeur des comptes d’épargne sans avoir à verser aucun intérêt dessus.
Un système bancaire en détresse partout en Occident.
Or le paysage a changé drastiquement lorsque le taux directeur est passé en quelques mois de 0,25 % à 4,5 % (5% chez nos voisins du Sud), faisant par le fait-même exploser le taux d’emprunt court terme des banques. Qui plus est, les banques doivent désormais verser de l’intérêt sur l’argent dans les comptes courants afin d’éviter la fuite de ces capitaux vers d’autres véhicules de placement court terme. Quant aux revenus des banques, les 2/3 des hypothèques en activité sont fixées jusqu’à la fin de leur terme à des taux beaucoup plus bas que le taux en vigueur. Par ailleurs, les banques ont fermé les valves des prêts hypothécaires, prêts personnels, crédits commerciaux et autres, devant l’accroissement du risque de défaut des payeurs, dont les budgets n’ont pas été pensés pour faire face à de tels taux. Les emprunteurs eux-mêmes ralentissent leur utilisation du crédit lorsque les taux montent, ce qui a aussi une incidence défavorable sur l’actif des banques.
Devant l’accumulation de liquidités et la nécessité de dégager des rendements, les banques se sont tournées massivement vers les placements obligataires à partir du 2e trimestre de 2021. Le marché des Repo a été largement utilisé à cet effet (voir notre article L’explosion des Reverse Repo), mais aussi des obligations avec des échéances longues afin d’aller chercher un coupon plus intéressant. Ces échéances sont devenues une épée de Damoclès lorsque les taux sont montés car plus elles sont éloignées dans le temps, plus elles créent des pertes de valeur énormes dans les portefeuilles obligataires quand les taux montent.
Des bilans financiers opaques
Personne ne s’est inquiété jusqu’à récemment car les bilans des banques ne reflétaient pas cette situation. En effet, ces dernières ont le droit d’inscrire la valeur de leurs portefeuilles à la valeur d’acquisition au lieu d’utiliser la valeur marchande des placements. Cette façon de faire permet de présenter des bilans qui semblent sains, un usage légal mais ô combien trompeur!
Le premier domino à tomber : la Silicon Valley Bank (SVB)
Qu’arrive-t-il lorsqu’une partie des clients d’une petite banque sont de riches dirigeants de compagnies technologiques qui ont des comptes à valeur élevée? Et qui par surcroît ont accès à des équipes entières de conseillers en comptabilité et finance très bien placés pour saisir l’effet d’une hausse fulgurante des taux d’intérêts sur la santé des banques? Eh bien, ces épargnants informés et apeurés ont sorti leurs fonds de la Silicon Valley Bank, obligeant la banque à vendre à lourde perte ses obligations pour fournir les capitaux demandés. Ces pertes -créées par la hausse des taux- se sont révélées si importantes que le simple retrait d’une fraction des dépôts est venu à bout de l’équité de la SVB, forçant cette dernière à la banqueroute, et dévoilant au monde entier la santé défaillante du système bancaire dans la conjoncture actuelle. Le doute plane désormais : peut-on encore faire confiance au système bancaire?
Les faillites bancaires se multiplient pendant que confiance au système bancaire s’étiole.
Depuis l’événement de la SVB, trois autres banques américaines ont fait défaut, en plus des banques européennes Crédit Suisse et Deutsche Bank qui ont également subi de lourdes difficultés. Aujourd’hui, c’est au tour de la banque américaine First Republic d’être saisie par les autorités. Combien d’autres banques sont aux prises avec des valeurs d’actifs en forte baisse? Probablement la plupart d’entre elles. Si les valeurs de tous les actifs bancaires étaient réinscrites à la valeur marchande, la majorité des banques seraient possiblement en défaut de bilan.
Si les taux se maintiennent à ce niveau, ou pire encore s’ils montent encore un peu, on aura d’autres mauvaises surprises bancaires comme celle qui vient d’arriver. Et on n’a même pas encore vu apparaître les problèmes des défauts des clients dans le secteur hypothécaires comme en 2008! Ici, au Canada, la SCHL assure les banques contre les défauts de paiements de la majorité des emprunteurs hypothécaires, mais la problématique actuelle est tout autre puisqu’elle touche les investissements des banques, ce qui crée de l’incertitude également pour le système bancaire canadien.
Comme Éric Sprott le mentionnait dans une entrevue écoutée sur Sprott Money jeudi dernier (entrevue avec Eric Sprott), « la crise bancaire n’en est qu’à sa première manche… ». Et les prochaines manches risquent d’être douloureuses si on se fie aux propos de Charlie Munger dans son entrevue de cette semaine avec le Financial Times, où il a dit des banques américaines qu’elles étaient « remplies de mauvais prêts commerciaux » (entrevue avec Charlie Munger). Lui qui a longtemps investi dans les banques, il semblerait qu’il ne fasse désormais plus confiance au système bancaire comme investissement fiable.
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Cette information a été préparée par Pascal Charpentier qui est un gestionnaire de portefeuille et conseiller en placements pour iA Gestion privée de patrimoine inc. et ne reflète pas nécessairement l’opinion de iA Gestion privée de patrimoine inc. L’information contenue dans le présent bulletin provient de sources jugées fiables, mais nous ne pouvons pas garantir son exactitude ni sa fiabilité. Les opinions exprimées sont fondées sur une analyse et une interprétation remontant à la date de publication et peuvent changer sans préavis. De plus, elles ne constituent ni une offre ni une sollicitation d’achat ou de vente des titres mentionnés. L’information contenue dans le présent document peut ne pas s’appliquer à tous les types d’investisseurs. Le conseiller en placements ne peut ouvrir des comptes que dans les provinces où il est inscrit.
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